a cave roussillonnaise Arnaud de Villeneuve, basée à Salses, traverse une période de turbulences face aux différents scénarios envisagés pour cette coopérative issue de la fusion et de la restructuration des sites de Salses et de Rivesaltes, à l'occasion de la reprise du site Sopagly en 2007. « En rachetant ce site et y investissant pour construire une cave de vinification des plus modernes il y a 18 ans, nous avons calibré un projet visant une production de 90 à 100 000 hl de vins chaque année. Or nous n'allons arriver qu'à 18 000 hl pour ce millésime 2025 », pose directement le président de la cave Arnaud De Villeneuve Brice Cassagnes.
Un investissement massif sur un site de production que continue à rembourser la cave - « nous aurons fini de payer et amortir les diverses tranches d'investissement d'ici 3-4 ans », explique Brice Cassagnes - mais qui, couplé aux dramatiques baisses de récolte enregistrées depuis de nombreuses années, pèse à présent trop lourd pour des revenus qui n'ont fait que suivre la baisse des volumes récoltés. « Nous avons été à l'équilibre les 6 premières années qui ont suivi l'investissement, mais depuis, nous avons du faire face à une baisse inexorable de nos volumes pour un équilibre financier qui devient intenable en l'état », livre le président de la cave Arnaud De Villeneuve. Pourtant, 40 000 hl suffiraient à maintenir un équilibre financier d'exploitation, selon Brice Cassagnes, un volume atteint en 2022.


Mais depuis, c'est une baisse constante , « 30 000 hl en 2023, 22 000 en 2024 et 18 000hl cette année, avec des rendements moyens avoisinant les 17hl/ha depuis deux ans?nos adhérents continuent de recevoir leurs acomptes pour maintenir le rôle d'amortisseur social de la cave, mais l'équation est devenue trop déséquilibrée si on y ajoute en plus les arrachages », détaille le président de la coopérative comptant encore un peu plus de 150 adhérents. Productrice en partie de vins doux naturels (environ 6000hl en 2025) vendus en vrac, la cave peut se targuer de bien valoriser la plus grande partie de sa production, en vins secs. « Nous vendons chaque année 19 à 20 000 hl de vins conditionnés en bouteilles et Bibs, donc avec à peine 12 000 hl de vins secs sur le millésime 2025, nous ne sommes même plus en mesure de couvrir ce débouché essentiel », enchaîne Brice Cassagnes.
Cette nouvelle mauvaise récolte a donc mis à mal le projet de rapprochement de la cave avec son homologue audoise des Celliers du Soleil, basée à Cuxac d'Aude. « L'idée était d'aboutir à la sortie des vendanges, mais à ce niveau de récolte, le projet ne tient plus en l'état. Les discussions restent ouvertes, mais nous devons redéfinir les termes du rapprochement. Nous nous sommes fixés jusqu'à fin octobre pour cela et le présenter en novembre aux adhérents », pose le président de la cave roussillonnaise. Les différentes perspectives qui se présentent étaient donc au centre de la réunion organisée le 8 octobre pour les adhérents. « Nous avons exposé tout cela à nos vignerons, le plan de rapprochement avec les Celliers du Soleil dépendant également du positionnement des banques et de l'Etat pour le retraitement de notre passif », pose Brice Cassagnes.
Sans quoi une procédure de placement en redressement judiciaire s'imposera. « Les acomptes continueront d'être versés jusqu'à la fin de l'année. Nous payons encore une partie de la vendange 2023 à nos adhérents, pour la partie VDN, et la vendange 2024. Mais c'est la suite qui compte car un redressement impliquerait un gel des paiements donc un gel des acomptes à destination des adhérents », développe le président de la cave basée à Salses. Il reste également lucide sur un scénario du pire, où l'absence de solutions entraînerait une mise en liquidation de l'entité coopérative. « Nous n'avons pas éludé le sujet avec les adhérents, leur rappelant néanmoins que ce scénario ne dévaloriserait pas tous les actifs, stocks de vins et matériel, de la cave », place Brice Cassagnes. Arguant de l'intérêt des Celliers du Soleil pour le site de production de la cave Arnaud de Villeneuve, Brice Cassagnes privilégie bien évidemment le rapprochement entre les deux caves, déjà en partenariat commercial depuis deux ans pour de la prestation de vinification. Dans le Roussillon, certains détracteurs se demandent pourquoi ce rapprochement n'a pas été opéré plus tôt au regard des baisses de volume qui se succédaient, mais on a pu le voir par le passé, les fusions de cave ne se limitent pas à de simples additions de chiffres pour aboutir.