omme chez les voisins gardois, ce millésime 2025 s’est distingué dans le Vaucluse par une précocité « où on a pu relever 2 à 3 semaines d’avance par rapport à l’an dernier selon les secteurs, avec un coup de chaleur du 15 août qui a nécessité de démarrer vite et fort sur les secteurs précoces », déroule le consultant viticole de l’ICV Tristan Perchoc. Même en présence de réserves d’eau, la chaleur a entraîné une concentration rapide dans les baies des zones précoces « avec par exemple des Roussanne qui sont passées en moins d’une semaine de 12,5° à 15° potentiels à Châteauneuf-du-Pape », reprend le consultant de l’ICV.
Cette concentration n’a pourtant pas trop affecté des valeurs d’acidité que Tristan Perchoc juge « encore bonnes aujourd’hui, en particulier les concentrations en acide malique qui ont finalement bien tenu ». L’autre conséquence de cette concentration a concerné la baisse des rendements en jus et, par voie de conséquence, « un impact sur les teintes, avec des moûts assez jaunes », indique l’œnologue consultante du laboratoire Natoli Adeline Bauvard. Tristan Perchoc confirme cet enjeu de lutte contre l’oxydation, surtout en début de campagne, tout autant que le directeur de la cave luberonnaise de Lumières, Julien Fauque, qui a vu « des rosés de grenache très marqués par ce côté jaunissant, qu’il a été bon de rééquilibrer avec un peu de syrah pour récupérer de belles teintes ».


Les fortes précipitations du 1er septembre ont ensuite fait largement évoluer la donne dans les vignes, avec des variations de quantités d’eau selon les secteurs, pour entrer dans une période de vendanges où il a fallu faire preuve d’adaptation et d’agilité. « Ça a pu varier de 75 à 150 mm mais ça a sonné le branle-bas de combat, d’autant qu’il y a eu ensuite de la pluie une fois par semaine et une ambiance marine et humide du 1er au 10 septembre, favorisant encore les décrochages. Quelques Syrah ont pu regonfler mais les états sanitaires sont devenus fragiles, même sur des Grenache qui avaient tenu le choc jusque-là », développe Adeline Bauvard. « Notre secteur a été moins arrosé que près du Rhône, mais il a fallu se dépêcher de rentrer les parcelles les plus fragiles, trier, sélectionner, et essayer de prendre le temps sur ce qui pouvait encore mûrir. On a constaté 35% de différences de cumuls de pluie entre les deux secteurs d’approvisionnement de la cave, il a donc fallu beaucoup adapter », indique Julien Fauque, dont la cave devrait finir de rentrer des raisins d’ici le 10 octobre.
« Mais nos vignerons commencent à avoir l’habitude de s’adapter, et parviennent à gérer dans le calme et par ordre de priorités », valide Tristan Perchoc. Car au-delà des décrochages sanitaires, « ces conditions climatiques ont complètement décorrélé les maturités phénologiques et les concentrations en sucres dans les grappes ». En particulier sur les grenache, qui ont tantôt requis d’attendre les maturités phénologiques sur les parcelles qui ont bien résisté aux coups de chaud « et qui ont alors pu donner de belles choses », valide le consultant de l’ICV, ou qu’il a fallu rentrer plus vite sur les parties échaudées, « voire trier des parties de grappes car les échaudages se sont beaucoup plus manifestés sur les faces orientées à l’ouest et les ensoleillements d’après-midi et fins de journées », précise encore Adeline Bauvard.
Si c’est encore un peu tôt pour conclure, le niveau de récolte sera certainement en retrait de 15 à 30% par rapport à l’an dernier selon les secteurs. Julien Fauque souligne en outre la nécessité d’adapter les interventions œnologiques à la pression botrytis en insistant sur les sulfitages, collages préventifs et débourbages.