’est un tandem bien rodé qui a séduit le public venu en nombre ce 23 septembre à la Cité du Vin, dans le cadre des Vendanges du savoir de l'Université de Bordeaux. François-Régis Gaudry, voix mesurée, explique qu’il a lancé, en octobre 2017, l’émission de gastronomie dans laquelle le vin a toute sa place baptisée "On va déguster" sur France Inter, chaque dimanche de 11 heures à midi : « nous parlons à 2 millions d’auditeurs régulièrement. Notre responsabilité est de parler du vin avec justesse, équilibre ». Jérôme Gagnez, voix chaude, verbe haut, chroniqueur dans l’émission, donne sa ligne directrice : « Le vin est pour moi une passion dévorante et je veux transmettre cette passion. Mais je n’ai pas de chapelle. Il y a des domaines dont j’aime beaucoup les vignerons, mais dont je ne parlerai jamais de leur vin parce qu’ils ne me plaisent pas ». C’est dit !


Très vite le sujet de la loi Évin arrive sur le tapis : comment faire ce métier dans le contexte de cette loi adoptée en 1991 ? « Elle a marqué un tournant contre la tabagisme et l’alcoolisme. Elle encadre notre parole sur le vin », indique sobrement François-Régis Gaudry. Jerôme Gagnez lui, met les pieds dans le plat : « 35 ans plus tard, observe-t-on qu’il y ait moins d’alcoolisme en France ? Non. Dès qu’on parle de cette loi, on met en photo un type et un verre de vin. J’aurais tendance à mettre une canette ou un verre de vodka. On est le seul pays producteur qui se tire une balle dans le pied ».
Son compère joue la modération : « Faire de la pédagogie autour du vin, expliquer les hommes et les femmes qui travaillent derrière une bouteille. C’est presque une façon de combattre l’alcoolisme ». Et d’évoquer ses débuts en 2010 sur France Inter : « pendant l’émission, on évitait le bruit des bouchons. On était beaucoup plus précautionneux ». Aujourd’hui, une certaine souplesse s’est instaurée. « L’ARCOM considère que notre approche n’est pas dangereuse car nous abordons le sujet par le biais patrimonial, humain, économique. Et c’est cela aussi notre mission de service public » indique-t-il.
Plaidoyer pour le clairet
Arrive la question du prix du vin. Jérôme Gagnez en profite pour rappeler qu’il y a beaucoup de vins sous valorisés à Bordeaux, voire méconnus. Exemple ? le Clairet. « Un vin axé sur le fruit, la fraicheur, peu de tanin, bourré de qualités. Il coche toutes les cases et correspond aux attentes des consommateurs. Pour des raisons que j’ignore, les instances bordelaises s’abstiennent soigneusement de communiquer sur ce vin. » Sourire complice de François-Régis Gaudry qui interroge : « Est-ce que les instances auraient honte du clairet ? »


« Je ne les ai jamais rencontrées. Je note qu’à Bordeaux au resto, il n’y a pas de clairet. On trouve de la bibine à glaçon provençale. Foutez-moi dehors cette bibine ! » lance Jérôme Gagnez. Applaudissements nourris dans l’assistance. A l’évidence, pour sortir de la crise, le chroniqueur vin estime que le clairet fait partie de la solution, tout comme le crémant ou encore ces cépages tel que le sémillon. Et de marteler haut et fort : « Il faut redonner aux bordelais le goût de leurs vins ».