oursuivis pour la commercialisation de 18 645 hectolitres entre 2016 et 2019 de « vin piqué, corrompu, ayant fait l’objet de falsifications, mélanges illicites, mouillages et substitutions » par les Vignerons de Puisseguin Lussac Saint-Émilion (VPLSE), les trois prévenus sont déclarés coupables par la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Libourne ce 13 décembre. En tant que personne morale, la cave coopérative écope de 300 000 euros d’amendes, dont 150 000 € avec sursis, le directeur général d’alors, Benjamin Maison, est condamné à 6 mois de prison avec sursis assortis de 6 000 € d’amende, la maître de chai de l’époque, Carine Crauland, est condamnée à 3 mois avec sursis. Rappelant que les condamnés ont 10 jours pour faire appel s’ils le souhaitent, la présidente de la chambre correctionnelle, Stéphanie Forax, précise qu’un sursis suspend une condamnation à l’absence d’infraction pendant cinq ans, et qu’un règlement sous un mois des amendes au Trésor Public permet de réduire de 20 % les sommes dues (soit 120 000 € pour l'amende de la cave).
Par rapport aux réquisitions, les condamnations ont été allégées pour la cave coopérative (le parquet demandant 300 000 € à la personne morale, avec 100 000 € de sursis). Le tribunal précise également le partage des responsabilités entre les condamnés : 70 % pour la cave coopérative, 20 % pour l’ancien directeur et 10 % pour l’ancienne maître de chai. Tous sont condamnés pour la conservation de volumes piqués d’anciens millésimes en appellations Puisseguin, Montagne, Bordeaux... qui étaient en partie assemblés avec des lots sains pour respecter la réglementation (0,98 g/l d’acide volatile), et parfois envoyés à la distillerie en lieu et place de volumes excédentaires du généreux millésime 2016 dépassant les rendements (Dépassement du Plafond Limite de Classement, DPLC). Des suspicions de mouillage sont également relevées par l’administration (Direccte), dont les rapports relèvent des falsifications du logiciel de traçabilité pour maquiller les assemblages et transferts de volume d’un lot piqué à un lot AOP ou à une distillation DPLC
Assumant avec constance les fraudes qui lui sont reprochées, la cave précise à Vitisphere que les faits condamnés sont désormais anciens. « Les anomalies constatées par la Direccte étaient la conséquence de pratiques aussi regrettables qu’inappropriées, à l’initiative de deux responsables de l’époque qui ont agi sans le consentement de la coopérative » explique Thomas Sidky, le président de la coopérative, ajoutant qu’« après réception des rapports de la Direccte, les lots concernés ont été isolés, bloqués puis détruits ». Ayant renouvelé ses équipes dirigeantes et opérationnelles, la cave indique que « ces pratiques appartiennent donc à un passé révolu ». S'étant réuni dans la foulée du verdict, le conseil d’administration de la coopérative annonce ne pas faire appel, car « la cour a tenu compte du fait que les pratiques reprochées à notre coopérative relevaient de l’initiative de deux responsables de l’époque qui ont agi de leur propre chef, sans le consentement de la coopérative », et d'ajouter qu'« il est nécessaire de rappeler que la coopérative n’a tiré aucun bénéfice de ces pratiques aussi inappropriées que regrettables ».
Ayant anticipé l'amende dans ses comptes, la coopérative va pouvoir s'en acquitter, et se projeter sur l'avenir maintenant que ce dossier est clos. Évoqué lors de l'audience de plaidoiries, l'enjeu pour la coopérative était sa viabilité économique face à cette amende s'inscrivant dans le difficile contexte commercial des vins de Bordeaux. Pour la justice, « le but n’est pas que la cave coopérative soit à genou à l’issue de la condamnation » indiquait alors la vice-procureure Élodie Blier.