Rotundone
Les vins poivrés s'obtiennent au vignoble

De récents essais montrent que la vinification permet de limiter les notes de poivres. A l’inverse, il est difficile d’augmenter la concentration des vins en rotundone en cave. Tout se joue à la vigne.
La rotundone donne des arômes de poivre aux vins issus de nombreux cépages, tels que le malbec, le duras, le gamay, la mondeuse, le mourvèdre, ou le pineau d’aunis.
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Ce terpène très odorant est perçu par 75% des dégustateurs à partir de 8ng/l dans l’eau et de 16 ng/l dans le vin. En revanche, une personne sur quatre n’est pas capable de la sentir. Dommage, car une équipe de chercheurs a montré que les consommateurs appréciant les vins poivrés possèdent généralement un budget par bouteille supérieur à la moyenne.
« En outre, aucune concentration à partir de laquelle la molécule devient indésirable n'a pu être déterminée pour la rotundone » complète Olivier Geffroy, enseignant-chercheur à l’Ecole d’Ingénieur de Purpan. Avec deux collègues, ce spécialiste des arômes poivrés vient d’étudier l’incidence de plusieurs techniques de vinification sur la teneur des vins en rotundone. Il a publié ses résultats sur le site de l’association International Viticulture and Enology Society (IVES).
« Aucune des techniques testées, y compris l'utilisation d'enzymes pectolytiques au cours de la macération ou la mise en œuvre d’une macération pré-fermentaire à froid, n'a permis d'augmenter l’extraction de la rotundone par rapport au témoin vinifié à 25 °C pendant 8 jours » rapporte-t-il. Au contraire, une diminution de 20 % a été observée pour une vinification par macération semi-carbonique, pour des vins fermentés à l’aide de levures saccharomyces uvarum et lorsque la macération est prolongée de 6 jours après la fin de la fermentation alcoolique.
Les concentrations en rotundone dans les vins issus de thermovinification et les vins rosés, ne dépassent pas 20 % et 13 % des valeurs retrouvées dans les vins témoin. « L’ensemble de ces résultats souligne qu'il est crucial de récolter des raisins pourvus en rotundone afin d’élaborer un vin riche en ce composé » poursuit Olivier Geffroy.
Pour cela, mieux vaut connaître un millésime frais et humide, et favorable à l’oïdium. En revanche la pourriture grise diminue la synthèse de rotundone. « Il est aussi essentiel de récolter des raisins parfaitement mûrs, car la rotundone s’accumule tardivement dans les raisins » explique le spécialiste.
« Il a été démontré qu'une température supérieure à 25 °C affectait de manière négative l'accumulation de la rotundone et que la lumière pouvait stimuler sa biosynthèse. En conséquence, l’effeuillage apparaît recommandable uniquement sur la face du rang exposée à l’Est ou au Nord. » La charge et l'éclaircissage ne semblent pas avoir d’impact sur la rotundone, « ce qui est cohérent avec l’hypothèse de sa production in situ dans la baie » poursuit Olivier Geffroy.
Selon le chercheur, avant la véraison, l’irrigation favorise l’accumulation de la rotundone dans les baies. « Elle peut être combinée avec un « Passerillage Eclaircissage sur Souche », qui consiste à sectionner, deux à trois semaines avant la récolte, la baguette fructifère sur une vigne taillée en Guyot. »
Olivier Geffroy a enfin observé une grande variabilité de concentration en rotundone au niveau intra-parcellaire. Il recommande aux vignerons de réaliser des échantillonnages et de mettre en œuvre des vendanges sélectives, pour obtenir des vins plus ou moins marqués par les notes poivrées.