our Davy Chodjaï, pas de doutes : la taille en cordon est compatible avec de bons rendements. « Le cordon bien conduit redonne vigueur et régularité à des guyots fatigués », assure ce conseiller indépendant basé en Gironde. Depuis 2021, il suit un demi-hectare de merlot, initialement taillé en guyot, qu’il a converti en cordon chez Patrick Audureau, vigneron à Saint-Pey-de-Castets.
Pour bâtir ses cordons, Davy Chodjaï est parti de sarments taillés à 1 ou 2 yeux francs sur lesquels il a veillé à garder des coursons tous les 15 à 20 cm. Progressivement, la vigne a retrouvé de la vigueur et les rendements ont repris des couleurs. Sur l’ensemble de la période d’essai, ils sont supérieurs à ceux des pieds témoins qui sont restés en guyot double, taillés comme autrefois. « Ce sont des observations sur ces années-là, sur ce terroir-là, dans ces conditions-là. On pourrait avoir d’autres résultats ailleurs. Mais, au moins, ça montre qu’on peut produire autant, sinon plus, et pour moins cher avec le merlot », indique-t-il.
D’autres vignerons font le même constat sur ce cépage dont les yeux de la base sont fructifères. Au Château Sénéjac (40 ha), au Pian-Médoc, la conversion il y a cinq ans de 4,5 ha de merlot de 50 ans, promis à l’arrachage, a doublé les rendements. « On est passé de 20 à 45 hl/ha entre 2021 et 2024, savoure Fabien Fort, directeur d’exploitation jusqu’en août dernier et conseiller indépendant depuis. La taille, qui était devenue anarchique sur les guyots, a retrouvé de l’homogénéité avec les cordons. Ces vignes continuent de vivre et de produire alors qu’il aurait fallu débourser 30 000 € de prestation pour les arracher et les replanter, puis attendre cinq ans pour obtenir une nouvelle production. »
À Lussac-Saint-Émilion, Mathieu Bonté, directeur des domaines Bourotte-Audy (5 propriétés, 45 ha), a converti un demi-hectare à titre expérimental, il y a trois ans. « Des merlots âgés d’une trentaine d’années, dédiés à des blancs de noir et installés dans un terroir argilo-limoneux, détaille-t-il. Ce sont des vignes mal foutues, mal taillées, auxquelles nous voulions redonner de la vigueur. » Comme d’autres à Bordeaux, il pensait que la taille courte était synonyme de baisse des rendements. Mais il ne s’est rien produit de tel. « On a même des rendements plutôt meilleurs », observe-t-il, sans pouvoir chiffrer, ni expliquer davantage la différence.
Fort de ces bons résultats, Mathieu Bonté s’attaque à 3 ha de merlot supplémentaires. Avec prudence toujours « car on ne peut pas réduire les coûts et perdre 10 à 15 % de rendement, relève-t-il. On ne peut pas se le permettre. Or, dans le vignoble, il se dit que les rendements en cordon peuvent chuter au bout de quelques années. » Selon les résultats, Mathieu Bonté poursuivra la transformation de ses vignes. Se posera alors la question d’investir dans une prétailleuse. Pour l’heure, les cordons sont encore taillés à la main.
D’après Davy Chodjaï, le cordon prétaillé permet de réduire les coûts de 40 % et de gagner 16 heures/ha de temps de travail par rapport au guyot double. Ses calculs se basent sur des données de la MSA et intègrent la taille, le pliage et le calage, le premier épamprage, les deux levages et le deuxième épamprage. Pour une vigne à 6 500 pieds/ha taillée en guyot double, le temps total est estimé à 40 heures et à 4 420 €/ha pour l’ensemble de ces façons. L’installation du cordon demande en tout 35 h 30 pour 3 923 €/ha. L’année suivant l’installation du cordon, en taille manuelle, il ne faut plus que 33 heures/ha pour un coût de 3 646,50 €/ha (-17,5 % vs. guyot). Si la taille manuelle est précédée d’une prétaille mécanique, ces chiffres tombent à 24 heures/ha pour un coût de 2 652 €/ha.


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