« La matière organique c’est bien mais pas suffisant pour assurer la vie du sol », a expliqué Thibaut Deplanche, le DG de Celesta Lab, un laboratoire pionnier dans l’analyse de la vie des sols basé dans l’Hérault, le 6 novembre lors des 9 ème rencontres InnoVinseo, organisées par Inno'vin et Vinseo . Et ce n’est pas parce qu’il y a beaucoup de matière organique dans un sol que ce dernier est riche en micro-organismes. Car tout dépend de la qualité de la MO que l’on apporte : matière organique digestible riche en énergie, matière organique très stabilisé qui va plutôt servir d’habitat aux micro-organismes, humus qui va structurer le sol en se liant à l’argile…. Pour illustrer son propos, le spécialiste des sols a pris deux exemples de parcelles bourguignonnes proches l’une de l’autre. La première âgée de 26 ans est enherbée à 50 % et sa vigueur est un peu faible avec des rendements de 43 hl/ha. La deuxième, bonne à arracher, est âgée de 39 ans. Sa vigueur est faible avec des rendements de 10 hl/ha. Elle n’est pas enherbée mais le vigneron a opéré des apports de compost à 5 t/ha tous les trois ans. Dans les deux cas, les sols sont calcaires, le pH basique et avec un énorme stock minéral. Mais lorsque l’on analyse la biomasse microbienne : elle est abondante dans la parcelle enherbée et faible dans celle où il y a eu des apports de compost stable sans aucune autre restitution de matière organique fraîche.
« Beaucoup de MO dans un sol n’exclut pas de devoir en apporter ! », a insisté l’expert citant deux parcelles : l’une en cours de plantation et l’autre (pinot noir sur 161 49 C) âgée de 50 ans, non enherbée avec une vigueur satisfaisante et des rendements de 48 hl/ha. Dans les deux cas les analyses de la MO totale montrent des niveaux satisfaisants mais des analyses plus poussées de la minéralisation du carbone montre que dans la première parcelle il y a une surminéralisation du carbone et dans la deuxième une sous-minéralisation. « Dans la deuxième parcelle, la matière organique est très stabilisée et les micro-organismes ne peuvent pas s’en nourrir. Il est donc nécessaire d’y apporter de la MO plus digestible ». Dans la première parcelle, il peut être judicieux d’apporter une matière organique plus stable pour ralentir la minéralisation.
Là encore Thibaut Deplanche a remis les pendules à l’heure. « Le compost n’est pas le produit organique le plus adapté pour stimuler la vie des sols si les micro-organismes sont là mais manquent de nourriture. Car le compost améliore surtout le gîte mais pas le couvert ». Le spécialiste cite l’exemple d’une parcelle bio dans laquelle le vigneron travaille le sol avec 8 passages par an et apporte du compost (5 t) chaque année. Le sol est argileux et doté d’un bon stock en MO. Mais si le vigneron est satisfait de la qualité des raisins, il déplore des rendements faibles : 32 hl/ha. Les analyses montrent que si son stock de MO total est satisfaisant, il y a un déséquilibre entre la MO qui est liée et celle qui est libre donc disponible pour les micro-organismes. En clair, il n’y a pas assez de MO libre pour nourrir les micro-organismes. Dans sa situation, le compost n’est donc pas le produit adapté.



